
La rénovation énergétique des copropriétés est devenue un enjeu majeur face à l’urgence climatique. Un arsenal juridique inédit vient encadrer ces travaux, bouleversant les règles du jeu pour les copropriétaires. Décryptage des nouvelles obligations et opportunités.
1. Les nouvelles obligations légales pour les copropriétés
La loi Climat et Résilience de 2021 a introduit des obligations inédites pour les copropriétés en matière de rénovation énergétique. Désormais, les immeubles classés F ou G au diagnostic de performance énergétique (DPE) collectif doivent réaliser un audit énergétique avant 2024. Cet audit doit proposer des scénarios de travaux permettant d’atteindre la classe B ou C.
En outre, les copropriétés doivent élaborer un plan pluriannuel de travaux (PPT) sur 10 ans, incluant obligatoirement des actions d’amélioration de la performance énergétique. Ce PPT doit être voté en assemblée générale et mis à jour tous les 10 ans. Pour financer ces travaux, un fonds travaux obligatoire d’au moins 5% du budget prévisionnel annuel doit être constitué.
2. Le processus décisionnel pour engager les travaux
L’engagement de travaux de rénovation énergétique en copropriété nécessite un vote en assemblée générale. La loi ELAN a assoupli les règles de majorité pour faciliter l’adoption de ces travaux. Désormais, une majorité simple (article 24) suffit pour voter les travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Le syndic joue un rôle clé dans ce processus. Il doit inscrire à l’ordre du jour de l’assemblée générale la question de l’adoption du PPT et des travaux de rénovation énergétique. Il est tenu d’informer les copropriétaires sur les aides financières disponibles et les économies d’énergie attendues.
3. Les aides financières et fiscales mobilisables
Pour encourager les copropriétés à engager des travaux de rénovation énergétique, de nombreuses aides financières et fiscales ont été mises en place. Le dispositif phare est MaPrimeRénov’ Copropriétés, qui peut financer jusqu’à 25% du montant des travaux, plafonné à 15 000 € par logement.
Les Certificats d’Économies d’Énergie (CEE) constituent une autre source de financement importante. Les fournisseurs d’énergie sont tenus de financer des travaux d’économies d’énergie, ce qui se traduit par des primes pour les copropriétés. L’éco-prêt à taux zéro collectif permet quant à lui de financer jusqu’à 30 000 € par logement sur 15 ans sans intérêts.
Au niveau fiscal, les copropriétaires peuvent bénéficier d’une TVA à taux réduit (5,5%) sur les travaux d’amélioration de la performance énergétique. Certaines collectivités locales proposent des exonérations partielles de taxe foncière pour les logements ayant fait l’objet de travaux d’économies d’énergie.
4. Les nouvelles règles d’urbanisme à respecter
Les travaux de rénovation énergétique peuvent impacter l’aspect extérieur des bâtiments, nécessitant le respect de règles d’urbanisme spécifiques. La loi Climat et Résilience a assoupli certaines contraintes pour faciliter ces travaux. Ainsi, l’isolation thermique par l’extérieur (ITE) peut désormais déroger aux règles de prospect et de gabarit dans la limite de 30 cm.
Pour les copropriétés situées dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou aux abords d’un monument historique, des règles particulières s’appliquent. L’accord de l’Architecte des Bâtiments de France (ABF) est requis, mais la loi prévoit désormais un dialogue renforcé pour concilier performance énergétique et préservation du patrimoine.
5. Les responsabilités et garanties liées aux travaux
L’engagement de travaux de rénovation énergétique soulève des questions de responsabilité et de garantie. Le maître d’ouvrage, en l’occurrence le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic, est responsable de la bonne exécution des travaux. Il doit s’assurer que les entreprises intervenant sur le chantier disposent des qualifications requises, notamment la certification RGE (Reconnu Garant de l’Environnement) pour bénéficier des aides publiques.
Les travaux de rénovation énergétique bénéficient de la garantie décennale, qui couvre les dommages compromettant la solidité de l’ouvrage ou le rendant impropre à sa destination. Une assurance dommages-ouvrage doit être souscrite par la copropriété pour préfinancer les réparations en cas de sinistre, sans attendre les recours contre les entreprises responsables.
6. Le suivi et l’évaluation des performances post-travaux
Une fois les travaux réalisés, un suivi rigoureux des performances énergétiques est crucial. La loi Climat et Résilience impose la réalisation d’un nouveau DPE dans l’année suivant la fin des travaux pour vérifier l’atteinte des objectifs fixés. En cas d’écart significatif, des mesures correctives peuvent être exigées des entreprises intervenantes.
Pour optimiser les bénéfices de la rénovation, la mise en place d’un contrat de performance énergétique (CPE) peut être envisagée. Ce contrat, conclu avec un opérateur spécialisé, garantit un niveau de performance énergétique sur plusieurs années, avec des pénalités en cas de non-atteinte des objectifs.
L’encadrement juridique des travaux de rénovation énergétique en copropriété a connu une évolution majeure ces dernières années. Les nouvelles obligations légales, combinées aux incitations financières, créent un contexte favorable à l’engagement de travaux ambitieux. Les copropriétaires doivent s’approprier ce nouveau cadre pour transformer la contrainte en opportunité, contribuant ainsi à la transition énergétique tout en valorisant leur patrimoine immobilier.